LES BUTINEURS DU LIERRE

Ceux qui n’ont pas fait l’erreur, malheureusement encore fréquente, de couper les lierres, se réjouiront d’observer sur ces fleurs tardives de nombreux insectes floricoles.
A la fois abri et nourriture, le lierre représente pour de nombreux animaux, une ressource non négligeable qu’il convient de préserver.
Partout le nombre d’insectes, en particulier les pollinisateurs, ne cesse de diminuer. La floraison tardive du lierre constitue pour eux une véritable aubaine. En effet, cet apport de nourriture leur permettra de reconstituer leurs réserves internes, indispensables pour passer l’hiver sans problème.
Le lierre a besoin de lumière pour fleurir. Quand ses tiges rampantes se hissent vers le jour grâce à un support, de nouvelles feuilles ovales se forment et bientôt des grappes de fleurs apparaissent suivies de leur cortège de visiteurs affamés.

A tout seigneur tout honneur l’abeille du lierre, pas celle qui donne du miel, non, une véritable abeille solitaire dont l’espèce n’a été décrite qu’en 1993.
La collète du lierre (Colletes hederae) n’apparait qu’à l’automne. Sa langue courte est adaptée à la récolte du nectar sur les fleurs de lierre. Elle ne possède pas de brosse de récolte, le pollen est collecté grâce aux longues soies de ces pattes.
Les collètes creusent des terriers dans le sol. Placés cote à cote, ils constituent des bourgades, mais chaque abeille occupe individuellement son trou. Les parois de chaque cellule sont tapissées d’une substance semblable à de la cellophane. Cette fine couche isole de la terre le mélange de nectar et de pollen
déposé par les femelles. Elles pondent un œuf sur chaque.
La larve se nourrit seule du précieux mélange puis se transforme en nymphe. Elle ne sortira qu’à l’automne suivant après avoir passé une dizaine de mois sous terre. Sa vie aérienne durera seulement quelques semaines.

L’abeille domestique (Apis mellifera) se reconnait à ses corbeilles à pollen, preuve qu’il y a encore des larves à nourrir dans la ruche. Bientôt les abeilles hiverneront en consommant leur réserve de miel, nécessaire pour maintenir une chaleur de 20°C autour de la reine et même 30°C s’il reste du couvain.

 

Parmi les papillons, les vanesses sont les plus assidues, en particulier le vulcain (Vanessa atalanta). Certains individus migrent vers le sud mais beaucoup restent sur place comme le paon du jour et le robert le diable.

 

Cette belle dame migratrice (Cynthia cardui) n’est que de passage. Elle poursuit sa route vers le sud pour se reproduire. Sa descendance remontera vers le Nord au printemps prochain.

 

Les mouches vertes (Lucilia sp.), bleues ou à damiers ne sont pas en reste. Elles s’enivrent de nectar tandis que leurs larves se complaisent dans les chairs putrides qu’elles liquéfient et recyclent.

 

La tachinaire sauvage (Tachina fera) est une mouche parasite reconnaissable à son abdomen roux surligné de noir et ses poils hirsutes. Elle se nourrit de nectar et pond sur les feuilles où mangent les chenilles. Sitôt éclosent les jeunes larves pénètrent dans le corps des chenilles pour le dévorer de l’intérieur.

 

L’éristale des arbustes (Eristalis arbustorum) se déguise en  abeille mais ses petites antennes de mouche la démasquent, ainsi que l’absence de pelotes de pollen. Sa larve vit dans les eaux putrides. Elle n’est pas rare dans les purins d’orties où elle respire à l’aide d’un long siphon respiratoire, d’où son surnom de « larve queue de rat ».

En manque de pucerons, les coccinelles à 7 pts (Coccinella septempunctata), sucent le nectar des fleurs et mangent le pollen, avant de rejoindre la fissure où elles passeront l’hiver.

La douceur automnale a fait sortir quelques gourmandes cétoines dorées (Cetonia aurata) de leurs coques de terre dans lesquelles elles s’étaient transformées. Une fois repues, elles repartiront s’enfouir dans le compost et attendront le printemps pour s’accoupler et pondre.

Le frelon asiatique (Vespa velutina) fréquente aussi le lierre. En fin de saison, quand il y a moins de couvain à nourrir, les dernières ouvrières butinent les fleurs pour leurs propres besoins. Bien souvent il s’agit de futures reines qui font leurs provisions avant de trouver une cachette dans le bois pourrissant de vieilles souches. En cas de découverte, elles doivent être éliminées sans scrupule afin de limiter la prolifération de ce tueur d’abeilles dont l’action a été très virulente cette année dans le Val d’Oise.

Sous l’action efficace de ces butineurs, les fleurs ne tarderont pas à fructifier et les grappes de fruits noirs
feront le bonheur des oiseaux de l’hiver.    (Voir l’article en début d’année 2020).

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Commentaires: 8
  • #1

    Michelle (lundi, 30 novembre 2020 23:18)

    Bonsoir Gérard,
    Toujours aussi captivant et instructif ce reportage sur les butineurs de fin de saison !

    Merci de partager tes connaissances. Nous avons de plus en plus un regard différent lorsqu'on se promène dans le jardin.

  • #2

    Vetillard (lundi, 30 novembre 2020 23:25)

    L'abeille du lierre décrite en 1993!
    C'est hier...bravo pour ton regard!

  • #3

    Philippe Cerchiari (mardi, 01 décembre 2020 00:31)

    Du grand art, décidément. J'ai du lierre un peu partout dans le jardin : grâce à toi, mon cher Gérard, je regarderai ses fleurs tardives avec un œil tout neuf. Merci et bravo pour la qualité de tes photos et des commentaires qui les accompagnent.

  • #4

    Marie Noëlle Dumoulin (mardi, 01 décembre 2020 09:49)

    Merci pour l'envoi de ton blog qui est passionnant et où on apprend plein de choses. Bonne nouvelle : je ne coupe pas mon lierre qui est tout au fond du jardin et qui ne me gêne pas. Je vais voir s'il fait des fleurs.
    Grâce à toi, on s'intéresse à des choses inhabituelles.
    Bonne journée.
    Marino

  • #5

    jean-michel.cresto@wanadoo.fr (mardi, 01 décembre 2020 11:02)

    Cher Gérard,
    Depuis faune Asienne, grâce à toi, je ne cesse d'apprendre sur les insectes.
    Amicalement
    Jean-Michel C.

  • #6

    Christian Berquer (mercredi, 02 décembre 2020 12:41)

    Salut Gérard,
    Superbes photos, comme d'hab ! En septembre et octobre derniers, j'ai fait un peu de battage dans le lierre au fond du jardin, et aussi sur noisetier : quelques diptères, hétéroptères et coleos étaient au rendez-vous.
    Amitiés/bises (masquées...) de nous deux à partager avec Sylvie.
    Christian

  • #7

    Thierry Bidaud (lundi, 07 décembre 2020 13:28)

    Bonjour Gérard,

    Comme d'habitude, je découvre tardivement ton blog qui est toujours aussi intéressant. Très belles photos et un texte captivant, transmettant ton grand savoir sur le monde des insectes.
    Merci à toi de nous faire partager ta passion.
    A bientôt pour de nouvelles sorties, j'espère.
    Amicalement
    Thierry

  • #8

    Dorange Alexandre (mardi, 05 janvier 2021 19:31)

    Très intéressant, plaisant à lire.
    Ça me rappelle le 1er confinement où je photographié bourdons, chenilles et autres dans mon jardin.