Si les abeilles mellifères sont souvent citées comme référence parmi les insectes pollinisateurs, elles sont loin d’être les seules, beaucoup d’autres insectes souvent ignorés, participent à
cette action primordiale pour permettre aux plantes de produire leurs graines.
Pour assurer la fécondation des fleurs, le pollen contenu dans les anthères des étamines doit être déposé sur le stigmate du pistil. Pour éviter la consanguinité et permettre l’évolution, il est
préférable que le pollen provienne d’une autre fleur. C’est la pollinisation croisée dont les insectes sont un des principaux acteurs.
Pour attirer les pollinisateurs les fleurs produisent du nectar, un liquide sucré très énergisant que la plupart des insectes consomment sur place.
Voici un petit aperçu de l’action de quelques pollinisateurs parmi les principaux ordres d’insectes, en attendant des dossiers plus complets au fur et à mesure de nos découvertes.
Les composées (Astéracées) comme les chardons sont assez robustes pour accueillir une horde de cétoines drap mortuaire et produire ensuite ses graines
LES COLEOPTERES
Les coléoptères ne sont pas spécialisés dans la pollinisation des fleurs car ils s’avèrent peu efficaces pour transporter le pollen qui s’accroche mal sur leurs carapaces lisses. Cependant
quelques espèces porteuses de touffes de poils participent à la pollinisation croisée tels certaines cétoines, des clairons et des petits longicornes.
Munis de mandibules acérées, les coléoptères floricoles consomment les organes des fleurs qu’ils détruisent en partie. Il s’agit d’un lourd sacrifice pour les fleurs mais il suffit de quelques
ovaires rescapés pour que la production de graines s’accomplisse.
Les clairons sont de petits prédateurs qui chassent leurs proies sur les fleurs
mais qui profitent aussi des produits sucrés de la plante
LES LEPIDOPTERES OU PAPILLONS
Le citron (Gonepteryx rhamni) est un des premiers papillons du printemps. Une fois son repas effectué,
la femelle plus claire pondra sur les bourdaines et nerpruns, plantes-hôtes de ses chenilles
Avec leurs longues trompes, les papillons sont plus délicats. Ils recherchent les fleurs à corolles profondes, plus adaptées à leur morphologie, au fond desquelles ils puisent le liquide sucré. Les papillons ne consomment pas de pollen, cependant les grains se collent sur leur corps et sont véhiculés de fleurs en fleurs.
La longue trompe du moro-sphinx (Macroglossum stellatarum) lui permet de butiner de nombreuses fleurs sans se poser
LES DIPTERES OU MOUCHES
Très vif, le bombyle s’observe surtout au printemps quand il butine les fleurs à corolle profonde, Avec sa toison il ressemble à un petit bourdon mais il ne récolte pas de pollen et ne replie pas sa trompe.
A l’exception des Empis ou des Bombyles qui possèdent des trompes très allongées. Les trompes des mouches sont assez courtes, elles ne butinent que des fleurs d’accès facile comme les ombellifères (Apiacées) et les composées (Astéracées). Elles restent toutefois d’actives pollinisatrices.
De nombreuses mouches comme cette lucilie, se rencontrent sur les petits cadavres sur lesquels elles pondent leurs œufs mais elles ne dédaignent pas le nectar que leur offrent les fleurs.
LES HYMENOPTERES
Avec son corps massif recouvert de poils, le bourdon ne craint ni froid ni vent et sa puissance lui permet d’ouvrir
les fleurs à corolles fermées, ce que ne peuvent faire les abeilles.
L’ensemble des hyménoptères, guêpes chasseresses, guêpes parasites, tenthèdes…. se nourrissent sur les fleurs à la manière des mouches et ne récoltent pas le pollen.
Seuls les membres de la super famille des abeilles (apoïdes) qui comprend en France environ un millier d’espèces, sont adaptés à la récolte du pollen et du nectar qu’ils utilisent pour nourrir
leur progéniture.
L’abeille mellifère est une des seules qui transforme le nectar en miel afin de constituer des provisions pour passer l’hiver. Plus robustes, les bourdons sont de super pollinisateurs, ils
fabriquent aussi un peu de miel mais leur production reste très limitée dans la mesure ou leur colonie disparait avec l’hiver. Leur miel, moins travaillé, se conserve mal et ne constitue pour la
colonie, qu’une petite réserve en cas de mauvais temps.
Les autres abeilles sont pour la plupart solitaires, chaque femelle s’occupe de son nid d’une manière indépendante. Dès que la ponte a été effectuée sur la provision de pollen, le nid est
rebouché. La femelle n’y revient plus, elle construit de nouveaux nids et meurt quand sa provision d’œufs est épuisée.
Les abeilles mellifères et solitaires n’ayant pas tout à fait les mêmes pratiques, leur action de pollinisation est complémentaire ce qui favorise la biodiversité. Elles peuvent toutefois rentrer
en concurrence quand les fleurs se font rares suite à une météo défavorable ou dans des milieux appauvris par les activités humaines. Il convient donc de placer des ruchers dans des milieux
favorables riches de nourriture, et non pas par réaction à un effet de mode.
Les dasypodes ne tassent pas les grains de pollen humidifiés dans des corbeilles comme les abeilles mellifères. Celui-ci est réparti le long de leurs pattes postérieures d’ou leur surnom
« d’abeilles à culottes ».
Un pollen sec très disponible pour assurer la fécondation des fleurs
COMMENT AIDER LES POLLINISATEURS?
Le plus simple serait de de rien faire et de laisser la nature reprendre ses droits en conservant des haies, des arbres morts, et des fleurs sauvages. Mais l’homme a tellement modifié la nature
par ses activités qu’il devient nécessaire d’aider les pollinisateurs en leur procurant des sites de nidification et des sources de nourriture. Leur activité printanière dans les vergers est très
bénéfique à la production de fruits.
Les hôtels à insectes offrent quelques opportunités mais placés dans des lieux de passage, ils servent plus de faire valoir politique ou commercial. Peu entretenus, ils deviennent rapidement un
refuge de parasites et de moisissures.
Les abeilles solitaires ayant des rayons d’actions plus faibles que les abeilles mellifères, il est préférable de répartir des nichoirs plus petits dans des zones tranquilles où elles trouveront
leur nourriture. Il est important de les nettoyer chaque année à la manière des nichoirs à oiseaux.
Pour la nourriture des insectes floricoles, il est souhaitable de maintenir des zones fleuries du printemps à l’automne. Il faut privilégier les espèces locales de fleurs, en évitant les
créations horticoles comme les fleurs doubles crées pour l’esthétique mais vides de substances nourrissantes.
Plante grimpante toxique, la bryone dioïque est souvent éliminée des jardins. Elle nourrit pourtant une abeille spécifique : l’Andrène de la Bryone (Andrena florea).
INFORMATIONS
Un nouveau PNA (Plan National d’Action) en faveur des insectes pollinisateurs vient d’être décidé par le gouvernement. Les nouvelles réglementations tentent de limiter l’usage des pesticides à
des périodes où ils sont moins nocifs pour les abeilles mellifères, c’est-à-dire en soirée. C’est sans compter sur la présence des bourdons qui sortent souvent très tard et des papillons de nuit
déjà fortement impactés par les éclairages nocturnes.
Plutôt que de chercher le meilleur moment de la journée pour utiliser les pesticides, il serait peut-être préférable de trouver des solutions permettant de ne plus les utiliser du tout.
Il y a quelques améliorations, mais la France reste encore un des plus gros consommateurs européens de pesticides avec l’Espagne et l’Italie. D’autres parts, plus de 4000 tonnes de produits interdits en Europe
sont toujours exportés vers des pays plus tolérants qui nous fournissent ensuite des légumes bon-marché. Ces exportations devraient cesser en 2022 mais des dérogations restent toujours
possibles.
Selon Actu environnement qui relate une étude récente menée par plusieurs associations. Les dépenses publiques liées aux impacts négatifs des pesticides (coûts de régulation, de dépollution et
des maladies professionnelles) s'élèvent en Europe à 2,3 milliards d'euros par an alors que les bénéfices s'élèvent à 0,9 milliards d'euros. Sans oublier les 10 millions d’euros engagés dans
les actions de « lobbying »…
PUBLICATIONS
Abeilles en liberté
Née en janvier 2019, « Abeilles en liberté » est une revue trimestrielle créée par Bernard Bertrand, fondateur des éditions de Terran, bien connu des jardiniers et des naturalistes. Son
objectif est d’initier et d’accompagner un changement de regard sur l’abeille mellifère, étendu aux autres pollinisateurs et à la biodiversité en général.
Une revue indépendante qui a besoin de soutien pour continuer et se développer.
https://www.abeillesenliberte.fr
Dans l‘almanach de Rustica 2022, vous trouverez des petites rubriques sur les pollinisateurs et sur la vie des osmies, abeilles maçonnes printanières comme ce mâle d'osmie cornue qui vient d'éclore.
DOCUMENTATION
Pour accéder à un dossier photographique plus complet sur les pollinisateurs rendez vous dans la galerie photo.
https://www.blondeau-photonature.com/galerie-photo/insectes/pollinisateurs/
TRAVAUX PRATIQUES
Construction d’abris pour abeilles solitaires
Dimanche 12 décembre 2021 nous organiserons un atelier de fabrication de nichoirs à insectes dans notre local de Sannois. La place étant limitée nous ne prendrons que 7 personnes. Les intéressés
sont priés de s’inscrire par retour de mail.
www.associationclimax.com/animations-2021/nichoirs-à-insectes/
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Jean Yves et Marie josé Drouet (vendredi, 03 décembre 2021 18:04)
Merci Gérard pour ces superbes sujets. Plus que nous faire rêver tu nous ouvre les yeux !
Martine Lacaze (vendredi, 03 décembre 2021 19:45)
Que la nature est belle sous l’œil du photographe ! Merci aussi pour les infos
didier vetillard (vendredi, 03 décembre 2021 22:17)
Magnifique comme d'habitude...la Bryonne; que je déteste nourris une abeille et une coccinelle spécifique...ca me rend cete plante plus sympathique...
Thierry B. (lundi, 06 décembre 2021 18:37)
Bonjour Gérard. Un article toujours aussi passionnant d'un passionné engagé. Merci pour le partage.
À bientôt.
Thierry