ACCUEILLIR LES OSMIES

L’osmie cornue est un actif pollinisateur des fleurs précoces d’abricotier

La douce chaleur de mi-mars nous projetait déjà vers un printemps de rêve. Vanesses et abeilles étaient déjà de sortie mais un retour brutal du froid a stoppé net ce bel enthousiaste. Les osmies cornues, qui avaient déjà commencé à remplir leurs tunnels de pollen, s’abritèrent dans leur trou au passage du mauvais temps. Mais ces rustiques abeilles solitaires sont ressorties bien vite dès le retour du soleil en dépit d’une température matinale de 5°C. Au besoin, elles s’immobilisent quelques minutes au soleil afin de se réchauffer, avant de s’activer à nouveau autour des nids. Pour cette raison il est préférable d’orienter les nids vers l’Est, afin qu’elles profitent des premiers rayons du soleil.
Très actives, ces abeilles solitaires complètent le travail des abeilles mellifères qui sont encore un peu frileuses en début de saison. Le pollen transporté par les osmies sur leur ventre est plus volatile et permet une meilleure pollinisation des fleurs.
Sans danger, ces abeilles bien que porteuse de dard, ne sont pas agressives. Et chacun peut facilement contribuer à leur accueil en accrochant quelques nichoirs dans son jardin ou sur son balcon.

LES DIFFÉRENTS TYPES DE NICHOIRS

Les bois percés constituent les nichoirs les plus simples à fabriquer.
La mise en place d’un rouleau de papier dans les trous permet un meilleur nettoyage

Le plus simple pour les attirer, consiste à percer des trous de diamètre 4, 6 et 8 mm dans un bout de bois dur (pas de bois tendre qui peluche, éviter les conifères). Orienté vers l’Est, ce nichoir sera placé dès le mois de février.
Cependant au fil des années, ce type de nichoir devint sale et se rempli de parasites. De ce fait, ils sont de moins en moins utilisés par les osmies.
Il est utile de les nettoyer chaque année, d’isoler les cocons des abeilles et d’ajouter de nouveaux nichoirs.
Il est toutefois difficile de contrôler si ces trous operculés contiennent encore des insectes vivants.
La solution pour en être sûr est de les isoler pendant une saison dans une cave fraiche qui communique avec l’extérieur.  Ceci permettra aux derniers insectes qui pourraient encore être à l'intérieur, de sortir sans être tenté de revenir, vu l’emplacement sombre et humide. Une fois vide le nichoir peut être à nouveau nettoyé et replacé à l’extérieur.

Pour faciliter ces problèmes d’entretien, il suffit de placer à l’intérieur des trous un petit rouleau de papier kraft afin de permettre le nettoyage automnal et la récupération des cocons. Faire légèrement dépasser le papier afin de récupérer plus facilement le rouleau. Par contre le papier conservant l’humidité, il est préférable de les placer à l’abri d’un toit.

L’autre solution consiste à utiliser des tubes de cartons ou de divers végétaux (renouée, ombellifères, cardère…). J’évite le bambou car même s’il est bien accepté par les abeilles, il se fend souvent en séchant et il reste très difficile à ouvrir pour extraire les cocons.
L’inconvénient des tiges naturelles est leur manque de régularité d’ou la difficulté de bien les ranger dans la boite. Un peu de mousse permet de les caler. Il est utile de placer un grillage devant les nids pour éviter la chute des tubes, tout en laissant le passage aux abeilles. Mais c’est surtout pour les protéger des oiseaux comme les mésanges, les pics ou les pies qui cherchent à manger les larves ou récupérer la mousse pour leur nid.

Nichoir constitué de tiges de renouée du Japon.
Le grillage évite la prédation des oiseaux tout en permettant le passage des abeilles

N’oublions pas que les osmies cornues sont des abeilles printanières dont l’activité se limite au mois de mars et d’avril. Une fois que l’abeille maçonne a pondu et obturé les tubes, il n’y a plus d’activité visible. Les petits curieux pourront toutefois utiliser des tubes de verre ou de plastique transparents pour suivre l’évolution des larves.
Il suffit de percer des trous dans le couvercle d’une boite pour y fixer les tubes dont les corps restent dans le noir. Le fond du tube est obturé avec du coton ou de la mousse pour laisser passer l’air afin d’éviter la condensation et le développement de moisissures dans le nid.

On distingue bien dans ce tube transparent les œufs déposés par l’osmie sur les boulettes de pollen.
La larve va bientôt éclore et s’alimenter toute seule

L’ENTRETIEN DES NIDS

Dès la fin avril, quand les premiers tubes sont remplis de pollen et fermés d’une double paroi d’argile, on peut commencer à les mettre à l’abri dans un éclosoir, en prenant soin de ne pas les secouer afin d’éviter le décrochement de l’œuf pondu sur la boulette de pollen. A l’intérieur des tubes, les larves poursuivrons leur développement en consommant la provision de pollen récoltée par leur mère. Elles tisseront ensuite leur cocon pour se transformer en abeille sans craindre les parasites.

Quand la boite est fermée, les tubes restent dans le noir. Les insectes qui éclosent  se dirigent vers le seul point lumineux qui communique avec l’extérieur et restent piégés dans le bocal ce qui permet de contrôler les différents parasites

C’est aussi une façon de contrôler l’éclosion des parasites qui ont pondu dans les nids.
J’ai ainsi recueilli une femelle de gastéruption qui semble être (Gasteruption assectator), qui pond dans les nids d’abeilles solitaires à l’aide de son ovipositeur allongé, même quand les tubes sont obturés par les osmies. Voilà pourquoi il est conseillé de mettre les tubes à l’abri dès qu’ils sont bouchés.

Femelle de gastéruption (Gasteruption assectator) ayant éclot dans l’éclosoir.

Les osmies qui nidifient début mars sont moins sujettes aux parasites car ces derniers sortent plus tard quand la  température est plus douce. La petite mouche drosophile (Cacoxenus indagator) est leur principal parasite.
Elle tourne autour des nids, et rentre pondre à l’intérieur dès que l’abeille est sortie. C’est un cleptoparasite dont les larves consomment la provision de pollen collectée par l’abeille. Se retrouvant sans nourriture, la larve de l’osmie finit par mourir de faim.

La mouche drosophile (Cacoxenus indagator) se glisse dans le nid pour pondre
sur la provision de pollen entreposé par l’abeille

LA RECUPERATION DES COCONS

Pour limiter les parasites et obtenir de meilleures conditions sanitaires, il est conseillé d’ouvrir les nids pour les nettoyer et extraire les cocons.
Cette opération se pratique en fin d’été quand le développement de l’abeille est terminé. L’imago (insecte adulte) a éclot à l’intérieur du cocon qui peut être manipulé sans problème. L’osmie reste dans son cocon pendant tout l’hiver et ne sort qu’au printemps suivant.
Après nettoyage les cocons sont placés dans une petite boite éclosoir qui passera l’hiver à l’extérieur dans un endroit abrité des intempéries. Il est important qu’il reste au froid pour éviter les sorties précoces qui condamneraient les abeilles. Il sera ressorti fin février près des nouveaux nids de façon à ce que les abeilles retrouvent vite de nouveaux tubes à remplir.

Tubes fendus avant la récupération des cocons.
Certaines cellules contiennent encore du pollen car les larves sont mortes en cours de développement.

Certes, l’extraction des cocons reste une activité contraignante quand on a beaucoup de nids. Mais elle permet de garantir une meilleure santé des colonies d’abeilles maçonnes, contrairement à de nombreux hôtels à insectes qui, faute de soins, deviennent vite au cours des saisons un repaire de parasites qui nuisent aux abeilles solitaires plutôt que de les favoriser.

Abri pour tubes de carton surmonté d’une boite à cocon
Ces boites sont réalisées à partir de bois de palettes, peintes à la peinture suédoise à base de farine,
d’huile de lin et d’ocre rouge.

Enfin n’oublions pas que ces abeilles utilisent les nichoirs car leurs abris et leurs milieux naturels sont souvent détruits par ignorance, utilisation de produits toxiques et souci excessif de de la propreté qui nuisent à la diversité de la nature.
Face aux campagnes privées de haies et soumises à des techniques agricoles intensives, les parcs et jardins de nos villes deviennent des refuges pour de nombreuses espèces.
Conservons dans ces espaces un peu de nature sauvage, fleurs, arbres morts, tas de bois, brindilles sèches… où ces insectes sauront trouver leur place et assurer une meilleure pollinisation des végétaux.

Cette année nous mettrons en vente quelques plantes de jardin à prix réduit afin de financer l’acquisition de nouveaux nichoirs pour l’année prochaine.

Cet article complète « le printemps des osmies » publié en avril 2020

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Commentaires: 3
  • #1

    Didier vetillard (mercredi, 04 mai 2022 09:09)

    Superbe comme d'habitude...mention spéciale à la photo de Gasteruption assectator...

  • #2

    Michelle (lundi, 09 mai 2022)

    BRAVO !
    Magnifique reportage et superbes photos.
    Quelle passion !
    A travers ce descriptif, nous partageons également ta passion.
    Merci Gérard.

  • #3

    Jean-Marie et Carole (vendredi, 13 mai 2022 15:02)

    Merci pour toutes ces informations très détaillées et ces superbes photos...